Emmanuel Darnaud obtient le titre de vigneron de l'année dans la vallée du Rhône !
« Vigneron autodidacte »
Emmanuel Darnaud était de cueillette d’abricots le jour de cet entretien. Il en possède encore 7 ha, mais ne se dit plus polyculteur, comme l’étaient son père et son grand-père. Son métier, c’est vigneron à part entière et, plus précisément vigneron « autodidacte », formé au métier par l’expérience. Il a créé son domaine en 2001 en louant en fermage 1,3 ha à Crozes-Hermitage et l’a progressivement étendu par quelques rachats et fermage successifs, dont le dernier en date est un bail en 2021 d’une parcelle 1,5 ha en AOC hermitage. « C’est l’une des plus belles parcelles, cadastrée Greffieux, mais c’est plutôt du Bessards avec un sol de granite ! ». S’il possède aussi des parcelles à Saint-Joseph, au lieu-dit La Dardouille (« le soleil qui darde »), le cœur du domaine reste ancré à Crozes-Hermitage où avec 16,5 ha, dans la partie sud, sur les communes de La Roche-de-Glun et Pont-de-l’Isère, « des terroirs à rouge » précise Emmanuel, car ses « sols de galets roulés conviennent moins aux cépages blancs ».
Le Coup de Coeur du Guide Hachette des Vins 2023 :
Emmanuel Darnaud - Crozes-Hermitage - Au Fil du Temps 2020
« Le bon sens paysan »
Emmanuel Darnaud en est à sa troisième année de conversion bio. « Ce n’est pas une révolution. En 20 ans, je n’ai jamais utilisé de désherbants et on a toujours travaillé les sols et fait un gros boulot en vert. La certification, c’est utile dans notre communication, mais la vérité d’un vin se trouve dans le verre, pas sur l’étiquette. Il n’existe pas de formule magique ni de recette toute faite ; le bio aussi a ses problématiques. » Ce qui compte, c’est la faculté d’adaptation aux conditions de l’année, aux changements en cours, autrement dit « le bon sens paysan » qu’il appelle aussi son « sixième sens » : un mélange de feeling et d’expérience.
Même pragmatisme en cave, où l’intuition et l’observation sont les seules règles qu’il s’impose. Réchauffement climatique oblige, les derniers millésimes ont été chauds et secs avec des montées du degré d’alcool.
« Depuis 2018, on a introduit une proportion de vendanges entières, variable en fonction du millésime. Ce n’est pas une question de mode, mais ça apporte de la finesse, de la complexité et du dynamisme, à condition d’ajuster les durées de cuvaison. Je l’utilise comme une variable d’ajustement » et pas comme un dogme.
« On n’a pas le droit se de plaindre ! »
Depuis le début des années 2000, c’est-à-dire au moment de son installation, la syrah du Rhône nord a le vent en poupe, tirée par les appellations huppées mais qui profitent à toute la région. « On est un petit domaine, on a un réseau commercial qui fonctionne bien avec une part de grand export. On n’a pas le droit de se plaindre ! À Crozes-Hermitage, on a aussi cet avantage d’offrir des vins accessibles à tous, d’un style plus immédiat, dynamique, qui plaît aussi dans le monde de la bistronomie. Ses crozes-hermitage rouges se déclinent en trois cuvées : La Mise en Bouche, le plus léger (même « si tous mes vins possèdent de la structure »), Les Trois Chênes, le cœur de gamme qui chaque année doit être soigné « car c’est notre vin emblématique », et Au Fil du Temps, le plus structuré, qui provient d’une sélection de parcelles aux sols à la fois plus légers et plus profonds, c’est-à-dire moins stressants pour la vigne. Si cette cuvée n’est pas produite chaque année, le millésime 2020, une « super année, chaude mais sans excès, qui a donné des petits rendements et des équilibres très aboutis », était taillé pour elle. Bâti pour la garde, « moins démonstrative, plus serrée et plus en longueur », elle a donné de bien belles émotions au jury.