Rencontre avec la vigneronne Estelle Roumage, Château Lestrille Capmartin
La science, la pratique et l’héritage familial
Elle nous accueille sur le seuil de sa boutique, véritable corridor de la tentation. Ici, nous confie-t-elle, « on ne cherche pas à singer les belles manières de l’oenotourisme. Nous faisons de ce lieu un endroit intime de découvertes sensorielles, y compris pour les enfants. » L’entretien se poursuit dans la salle de dégustation. La pierre de taille, omniprésente dans le vignoble, donne la classe bordelaise à une demeure par ailleurs très simple. Sobre comme le décor minimaliste.
Estelle Roumage est riche d’un long apprentissage universitaire, commercial et viticole, acquis en France (Master Sciences viticoles à Bordeaux, Master de gestion) et à l’étranger (Angleterre, Chili, Nouvelle-Zélande). Comme nombre des vignerons de sa génération, elle n’a pas hésité à vinifier aux antipodes. Elle a su également recueillir l’héritage de l’exploitation familiale. « Mon père a fait « agro ». C’est lui qui a modernisé le chai. J’ai donc, en 2006, pris les rênes dans des conditions idéales. » Les vins de la propriété (entre-deux-mers, bordeaux supérieur) ont déjà été distingués du temps du père, ancien président des appellations bordeaux et bordeaux supérieur.
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Des vins accessibles et accomplis
Les coups de cœur du Guide ? Elle les truste, avec des cuvées à la fois élégantes et étoffées, accessibles et à prix doux. « Vous me dites treize ? » Ajoutant, l’air entendu : « Chacun d’eux procure une joie indicible », avant de préciser que ce genre d’hommage « c’est comme une véritable consécration... Et la récompense des efforts de tout un groupe. Nos employés – neuf permanents, eux aussi concernés par notre attachement au développement durable – ne sont pas étrangers à nos récompenses ». À la question de savoir ce qu’en pensent ses clients, elle répond qu’elle est « heureuse de les en informer. » « J’ai alors le sentiment de partager avec eux une sorte de secret ». Surtout lors de dégustations qu’elle entend « ne pas sacraliser ». Elle adore « la spontanéité ». Un peu plus tard, elle avouera ressentir chacun des coups de coeur comme « la reconnaissance d’un progrès ». Parce que « chaque progrès donne un nouvel espoir ». Puis, après une hésitation, elle ajoutera, lucide : « Ce nouvel espoir reste suspendu à la solution d’une nouvelle difficulté ». Perfectionniste, Estelle ! Ses vins ? Ils sont à son image. Elégants, oui. Mais sans tapage. Serait-elle violoniste que nous dirions : « Quel joli coup d’archet ! »