Hadrien Mouflard et Caroline Latrive de la maison de champagne Ayala obtiennent le titre de vigneron de l'année en Champagne
Ayala: des hauts et des bas
La maison naît, en 1860, du mariage Edmond de Ayala, descendant de nobles basques espagnols et fils d’un diplomate colombien, avec une héritière du cru, la fille du comte de Mareuil. Le frère d’Edmond est bien introduit auprès de la couronne britannique, et voilà Ayala fournisseur officiel de Sa Majesté, en 1908. Malgré l’incendie de ses locaux par des viticulteurs lors des émeutes de 2011, suivies de la Grande Guerre, la maison se rétablit et connaît même un âge d’or dans les années 1920, vendant 1 million de cols, avant voir son aura pâlir avec le marasme économique. C’est une belle endormie que reprend, en 2005, la Société Jacques Bollinger, groupe alors en pleine expansion, au-delà même de ses terres champenoises (Langlois-Château en Saumurois, puis Chanson en Bourgogne, avant le Cognac Delamain, en 2017 et Ponzi Vineyard en Oregon, en 2021).
Retrouver une identité
Dès 2007, le nouveau propriétaire investit dans une cuverie. En 2012, Hadrien Mouflard, secrétaire général depuis 4 ans chez Bollinger, est nommé Directeur général d’Ayala, avec pour mission de définir un style pour la maison, dont les champagnes «faisaient un peu figure de seconde marque de Bollinger ». Le jeune directeur (32 ans) s’appuie sur Caroline Latrive, œnologue formée à Reims, arrivée en 2007, qu’il nomme chef de cave après le départ à la retraite de Nicolas Klym. Une femme « à l’écoute », ayant l’expérience des assemblages, et dont la promotion s’est imposée comme une évidence, affirme Hadrien Mouflard. Ce travail de relance, qui s’accomplit par étapes, est mené de manière autonome par l’équipe qui dispose de ses propres locaux, adossés au coteau viticole, où tout le travail (gestion, élaboration, stockage, expéditions) est réalisé sur place, selon une organisation de l’espace verticale, très rationnelle. Les effectifs sont modestes : 25 personnes, environ la moitié à la production, des professionnels d’une grande polyvalence.
Un nouveau style sorti des cuves
Dès 1865, Ayala avait lancé le Dry Champagne, dosé à 21 g/l à une époque où beaucoup d’amateurs préféraient les champagnes doux, dosés à plus de 150 g/l. Pour renouer avec son passé tout en s’adaptant aux tendances du marché, la maison décide de mettre en avant la pureté de ses champagnes. Pas de fût, des cuves Inox: le vin à l’état pur; des dosages faibles et, pour privilégier la fraîcheur, beaucoup de chardonnay (45% dans le Brut majeur et le brut Nature, où il compose avec le pinot noir (35%) et le meunier, davantage dans le rosé et surtout dans La Perle (80%), cuvée de prestige millésimée qui repose 8 ans sur lies sous bouchon de liège. Une proportion qui devrait augmenter, annonce Hadrien Mouflard, et la maison a ajouté à ses approvisionnements des terroirs propices aux blancs, comme Montgueux ou la région de Vitry-le-François».
Ayala exploite en propre 22ha, à Chouilly, à Oger et dans la vallée de la Marne, et se fournit dans 70 crus. En parallèle, la qualité progresse, grâce à la nouvelle cuverie (2017) dotée de 120 cuves de 5 à 200hl : de quoi réaliser des vinifications précises jouant sur la diversité de crus vinifiés à part. Un style tout autre que les champagnes Bollinger, plus vineux, qui privilégient le pinot noir et cultivent les élevages sous-bois.
Élu coup de cœur du Guide, le brut nature reste 4 ans sur lies, un an de plus que le brut sans année, qui bénéficie déjà d’un repos prolongé : ce long vieillissement apporte plus de vinosité, évitant un côté trop tranchant lié à l’absence de dosage.
Le coup de coeur du Guide Hachette des Vins 2023 :