Laurent Scheidecker du Domaine Scheidecker, élu vigneron de l'année du Guide 2023 en Alsace !

Quelques mots sur l’histoire de votre domaine…

Les grands-parents vendaient déjà du vin en bouteilles, mais à une échelle modeste. Le virage a été pris avec mes parents, Sonia Zimmerlin et Philippe Scheidecker, qui ont fusionné les vignes familiales et rénové la cuverie dans les années 1990. Mon épouse travaille à l’extérieur. Mes parents, tout retraités qu’ils soient, continuent à m’appuyer. L’aide de mon père est précieuse, car il a la même sensibilité de palais que moi. Nous n’avons qu’une salariée, Anne-Marie, qui effectue de nombreux travaux dans la vigne et employons occasionnellement quelques indépendants. Quant à moi, je me déploie partout : vigne, vinification et commerce.

Quelles sont les atouts de vos terroirs ?

Nous disposons de 12 ha, pour les trois quarts en coteau ; pas moins de 100 parcelles, la majorité dans notre commune de Mittelwihr (près de Riquewihr), quelques-unes dans cette ville, et dans des villages voisins : Zellenberg, Bennwihr, Beblenheim. Nos terroirs sont surtout argileux, quelques-uns limono-calcaires, plus légers, en plaine. Cette nature argileuse est un avantage, car la région de Colmar bénéficie d’un climat particulièrement sec. De tels sols retiennent bien l’eau et assurent l’alimentation de la vigne lors des épisodes de sécheresse, plus fréquents.

Les parcelles en grand cru représentent 85 ares (7 %) : Froehn de Zellenberg, argilo-marneux, d’où je tire un muscat demi-sec, Mandelberg de Mittelwihr, marno-calcaire, qui porte du riesling et du gewurztraminer, Sporen, grand cru en pente douce, situé au sud de Riquewihr, aux sols argilo-marneux, dédiés dans notre domaine au riesling. Les pinot blanc et auxerrois entrent surtout dans ma toute dernière production, les crémants. Les vendanges tardives et sélections de grains nobles, que j’arrive à obtenir presque tous les ans, proviennent des gewurztraminer et pinot gris.

Avez-vous un cépage de prédilection ?

Le riesling, passionnant par les profils différents qu’il prend selon le terroir. J’en propose quatre. L’alsace riesling Tradition, issu d’un assemblage de terroirs (surtout argilo-calcaires), est tout en fruit, frais, avec une acidité mûre. Celui du Mandelberg, né sur des sols marno-calcaires et sous un microclimat méditerranéen, est aérien, plus rond, sur la fleur blanche, la pêche et la minéralité. Celui du Sporen a une grande aptitude à la garde. Les raisins mûrissent lentement sur ces sols lourds et les vins sont discrets dans leur jeunesse, mais ils tirent de ce terroir une grande puissance. Je conseille de les attendre 4 ans : leurs arômes – notes épicées, fruits exotiques bien mûrs – se seront épanouis et leur longueur sera remarquable. Produits sur le lieu-dit Bouxreben, à 300 m plus au sud, sur des sols argilo-marneux plus calcaires, les rieslings sont plus citronnés. Après une longue fermentation, ces vins secs sont élevés pendant 8 à 12 mois sur lies fines – en cuve Inox, qui apporte plus de précision. Je réserve aux rouges mes fûts (228 l) et demi-muids (500 l).