La famille du domaine Boudau, élue vigneron de l'année 2023 dans le Roussillon.
Au fil des générations
Une poignée d’hectares en 1920, date de la création du domaine, une cinquantaine aujourd’hui : au fils des générations, la famille Boudau a su faire prospérer ce vignoble niché sur des contreforts, dans la haute vallée de l’Agly. À la barre depuis les années 1990, Véronique (dans le chai) et Pierre (dans le vignoble) n’ont pas chômé pour relever tous les défis qui se posaient à l’époque, dont celui de la crise des vins doux. Il a fallu repenser le vignoble et le chai, construire une gamme de vins secs, réadapter et diversifier l’encépagement, conquérir une nouvelle clientèle, sans renoncer à produire des vins qui revendiquent fièrement l’accent du pays.
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Quant au passage au bio (certification en 2020), il s’est fait naturellement : « On travaillait déjà en très raisonné, sans désherbant depuis 30 ans », précise Véronique. Résultats : une gamme large et moderne qui explore toutes les facettes du Roussillon, un réseau commercial solide, une bonne réputation et des vins d’une fiabilité à toute épreuve comme en témoigne le palmarès du domaine dans le Guide depuis des années.
Nouveau visage, nouvel outil, nouveaux projets
Ingénieur de formation et après une carrière dans des grandes entreprises, Géraldine Boudau est revenue s’installer au domaine en 2020 pour épauler sa mère et son oncle. Un trio qui semble fonctionner en bonne harmonie : « On discute beaucoup, on se dispute gentiment, mais surtout on goûte, on échange et on décide ensemble. »
Et les sujets ne manquent pas. Il y a quatre ans, une nouvelle cave de vinification flambant neuve, plus spacieuse et plus fonctionnelle, a vu le jour. « Ça nous a offert beaucoup plus de liberté et de possibilités », se réjouit Pierre. Parmi elles, de nouvelles cuvées issues notamment des cépages blancs locaux replantés il y a une dizaine d’années : le tourbat (malvoisie du Roussillon), le macabeu et le grenache blanc. Il en est né un blanc haut de gamme, le « Pure souche » (100 % tourbat). Un rivesaltes blanc oxydatif, ainsi qu’un rancio dorment patiemment dans les fûts en attendant leur heure.
Identité et élégance
« On cherche surtout à produire des vins identitaires qui possèdent le tempérament du Roussillon, mais en y ajoutant ce qu’il faut de fraîcheur et d’élégance ». Un défi dans une région connue pour ses étés torrides, qui n’est pas épargnée par le réchauffement climatique. Pour lutter « on se réveille tôt et on travaille tard », s’amuse Géraldine. « On veille à l’enracinent de nos vignes, on s’appuie sur le passé (taille gobelet qui protège les vignes des morsures du soleil) tout en gardant un œil sur les recherches en cours (cépages résistants). « On a aussi un terroir un peu plus frais avec des entrées maritimes qui retardent les maturités », précise Pierre. « On est très vigilants sur les dates de récolte, quitte à les fractionner en goûtant très régulièrement les raisins ».
En cave, les Boudau ont adapté les vinifications. « On a naturellement des raisins concentrés, issus de petits rendements, entre 15 et 30 hl/ha. On extrait en douceur, avec quelques remontages doux », commente Véronique. Le but est de produire des vins avec la personnalité du lieu, mais digestes, frais et élégants, tout ce qu’incarne la cuvée Patrimoine, chère à la famille, et coup de cœur du Guide 2023. Elle provient des vieilles vignes de grenaches rapportées en 1967 de Châteauneuf-du-Pape par Henri Boudau, le grand-père de Géraldine : ces vieilles vignes, « c’est vraiment notre patrimoine ».